En participant activement aux nombreuses manifestations qui ont cours depuis plus d’un mois à Montréal, l’idée de la déambulation se modifie. Normal : déambuler n’a jamais été l’opposé de manifester. Certes, le trajet est, la plupart du temps, connu à l’avance, contrairement au hasard qui guide l’errance. Certes, on ne regarde pas le ciel, mais bien les pancartes, les banderoles et les passants qui nous appuient. Certes, nous n’avançons pas avec le simple but d’un accord avec l’extérieur et d’un abandon au lieu, mais bien avec l’objectif de faire du bruit pour se faire entendre. Dans ce cas, certes, nous ne sommes pas dans le respect du lieu, dans l’humilité et la solitude. Nous hurlons. Nous scandons des slogans. Nous nous imposons avec la force du nombre, de la colère et des rêves qui nous habitent.
Il y a pourtant un aspect qui se partage en moi-déambulateur et moi-manifestant. Ce sont les pas. Nous marchons. Auss simple que ça.
Tautologique, certes. Je m’explique.
Ce sont les pas et le mouvement du corps qui nous rattachent (nous-manifestants, nous-déambulateurs) à quelque chose qui vient de soi mais qui va loin, très loin, au-delà de l’individu. Nous sommes portés par le même désir, celui de laisser tomber l’égotisme et se confronter, s’étendre, se projeter. Vers l’autre, toujours.
Et cet autre, il est le même. En déambulant, en manifestant, l’autre est physique car nous tendons vers un lieu, social car nous tendons vers un groupe, métaphysique car nous tendons vers un idéal. De mes pieds vers l’autre, je sens donc que c’est simplement du pareil au même. Plus je manifeste, plus je démabule. Inversement, je comprends que la déambulation n’est pas un truc d’égo et qu’elle est bien plus qu’une activité oisive. Comme l’écriture, elle fait partie de tout un mode de vie dans lequel l’autre se tient à l’horizon. Alors, oui, je le dis, je l’écris. Déambuler fait partie des activités qui font de moi un être engagé. Socialement. Poétiquement. Ça va ensemble, c’est certain.
Je me suis donc engagé à profiter de cette grève pour manifester/déambuler le plus possible et d’en faire le travail qui s’impose toujours à moi. Voici donc un projet qui durera le temps de la grève. LE CADRE ROUGE ne fait pas irruption dans l’ÉCRAN FENÊTRE, ne lui fait pas compétition non plus. Il agit plutôt comme une brèche, une fissure, un pas de plus vers l’autre, parce que cet autre se modifie radicalement en ces temps protestataires.
Voilà pourquoi cette déambulation est au pluriel. Il s’agit d’une porte d’entrée vers ces nombreuses déambulations toutes nécessaires. Il s’agit de mes images qui cadrent les marches solidaires et teintées de rouge.
Par ici, la brèche : http://cadrerouge.wordpress.com/
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